MON JARDIN PERSAN

C’est l’histoire d’une fille suisse. Elle grandit dans son pays, y fait ses écoles, son apprentissage, elle vit comme la plupart des jeunes suisses, partageant son temps entre le boulot, le sport, les potes, les voyages, les concerts. Elle écoute toutes sortes de musiques, beaucoup de rock, de punk, de rap français, de jazz, de chanson franco mais aussi de la trance, de la techno, de la dance… Bref… sa collection de musique est un gros mélange.

Un jour, son goût de l’aventure et ses amours pour les romans de Jack London la font partir au Canada. Ça tu le sais déjà, si tu me suis depuis un moment.

Au Canada, à un moment donné, elle rencontre un mec qui sera son compagnon pendant 11 ans. Ça tu le sais aussi sûrement.

Ce que tu ignores peut-être car je ne suis pas certaine de l’avoir raconté, c’est que ce mec est lui aussi, un immigré. Il vient d’Iran. Lui il préfère dire de Perse. Il dit tout le temps qu’il est Persan, pas Iranien.

Ils ont fui le régime. Sa mère est de la minorité Bahaï. Toute la famille est monarchiste, ils sont attachés à l’époque du Shah. Quand ils étaient en Iran, avant la révolution, le père de ce mec écoutait de la musique rock, il matait des films américains, il lisait des livres d’auteurs français. Après la révolution, c’est devenu tellement l’enfer pour eux qu’ils sont partis au Canada.

Et un jour, au détour d’une soirée en boîte, au centre-ville de Toronto, la fille suisse et le mec iranien se rencontrent. Et quand deux immigrés se rencontrent, à la culture canadienne qu’ils découvrent, s’ajoutent leurs deux cultures respectives. Et là, dans ce cas, on parle d’une fille qui vient du pays connu pour sa démocratie directe et d’un garçon blessé par la dictature.

C’est le gros clash mais dans le sens positif et stimulant du terme. Il découvrent tout de leurs cultures respectives, la bouffe, la musique, les traditions, la langue, l’histoire et la politique.

À force, leurs racines respectives développent non seulement des bourgeons canadiens mais également, des bourgeons de la culture de l’autre. Ouais, ça fait un gros mélange mais qui fonctionne bien !

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Ce matin, Couleur 3, la radio suisse que j’écoute la plupart du temps et qui est connue pour sa musique plutôt alternative a lancé un morceau complètement inattendu, au milieu de ses sons habituels.

Dès la première note, j’ai su et j’ai souri. J’ai tout de suite reconnu le style, la langue, cette magnifique langue qu’est le farsi. J’ai reconnu la façon dont ils construisent leurs mélodies et cette sorte de tristesse dans la voix.

Je ne comprends pas les paroles mais j’ai écouté tellement de chanteurs iraniens que c’est un peu comme si je ressentais leurs textes. Sans pouvoir identifier clairement ce qu’ils disent, je perçois disons leurs ondes.

Je suis immédiatement tombée sous le charme de cette chanson. J’avais l’impression que quelque part, ça faisait partie de moi et ça m’a fait prendre conscience que toute Suisse (et maintenant aussi Canadienne) que je sois, j’ai cultivé, sans m’en rendre compte, quelque part dans mon âme, un petit coin de jardin persan. J’ai eu l’impression de découvrir une richesse dont je n’avais pas forcément eu conscience et j’ai trouvé ça vraiment cool. Ça m’a rendue contente.

Je t’invite à découvrir cette chanson, qui date des années 70, de l’époque où en Iran, on écoutait encore du rock psychédélique, où les filles portaient des minijupes, où on projetait des films de la nouvelle vague française et où Maurice Béjart présentait ses chorégraphies avant-gardistes.

À bientôt 🙂

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27 FÉVRIER 2018

Voilà, tu vas te demander « mais qu’est-ce qui lui est encore arrivé et pourquoi cette date ? » j’aurais tout aussi pu mettre en titre LE 24 DÉCEMBRE 2015 sauf que c’est quand même passé depuis un moment.

Ces deux dates sont à marquer dans les annales.

Elles se situent en plein hiver, à une période extrêmement glaciale ici en Ontario.

Sauf que… ce sont des jours où je suis sortie à moto et crois-moi, ça vaut son pesant d’or. Ça vaut la peine qu’on s’y arrête, qu’on en parle et qu’on en fasse tout un plat !

Cette semaine, on a eu subitement des températures qui sont montées à 7 degrés, voire même 11 en milieu de journée. Et cerise sur le gâteau, la semaine d’avant il avait plu comme vache qui pisse, ce qui fait que les routes étaient nickel et lavées de toute trace de sel.

Je te laisse imaginer l’état d’excitation dans lequel je me suis réveillée le matin du 27.

Le soir d’avant, j’avais vérifié si tout mon matos de moto (qui était au repos depuis le 3 décembre 2017, jour de ma dernière sortie avant que la neige n’arrive) était en ordre. Mes bottes étaient prêtes, j’ai dépoussiéré la visière de mon casque, préparé mes gants mon foulard et surtout, les vêtements que j’allais porter, sachant qu’il ferait à peine zéro degrés à 8h15 du matin lorsque je quitterais la maison.

Mais j’étais prête à me les geler un peu, au vu de la montée de la température qu’on annonçait pour le reste de la journée et surtout, sachant qu’il ferait grand soleil.

Quand je me suis levée ce matin-là, il faisait encore nuit et froid. J’ai sorti les chiens, ma respiration faisait de la buée dans la lumière du soleil levant. À un moment donné j’ai hésité, je me suis dite « tu veux vraiment te taper 45 minutes de moto dans ce froid ? » j’ai pas réfléchi trop longtemps. Je savais que si je ne le faisais pas, je le regretterais.

J’ai bu un grand café bien chaud, et commencé à empiler mes couches successives de vêtements. Un t-shirt à manches longues, un t-shirt à manches courtes, un gros hoodie, mon blouson bomber et par-dessus tout ça, ma veste de moto. Le tout couronné par mon gros foulard.

Quand je suis entrée dans le garage pour sortir la Scrambler ma démarche et mes gestes étaient aussi gracieux que ceux de Robocop, tellement j’étais coincée dans ce cumul de fringues.

Je suis entrée dans le garage et j’ai dit à la Scrambler : « Allez, dehors ! T’as assez dormi, ça fait 86 jours que tu te la coules douce, il est temps de te réveiller ». Je crois qu’elle était contente de sortir de ce garage où elle devait se sentir aussi emprisonnée que moi dans ma voiture.

J’avais besoin de sentir l’air froid sur mon visage et d’entendre le son du V-Twin. Ça me manquait trop.

Quelle journée de pure joie ! Je suis partie travailler en prenant des routes limitées à 60 km/h pour avoir moins froid, et à mon grand étonnement, quand je suis arrivée au boulot, je n’étais pas trop gelée. Juste un petit peu 🙂 Même mes mains avaient passé l’épreuve sans trop morfler.

À ma pause de midi, j’ai emmené ma Scrambler pour une petite sortie au bord du lac, pas très loin de mon travail, à Woodbine Beach. Il faisait un soleil resplendissant et carrément doux. Je l’ai stationnée face au lac et suis allée me chercher un café et un beignet que j’ai savourés, installée sur ma selle. Les oiseaux chantaient, beaucoup de travailleurs profitaient de leur pause de midi pour, comme moi, s’éveiller à cette petite parenthèse de chaleur et cet avant-goût des beaux jours.

On sait ici que cette vague de douceur était éphémère. Février au Canada, c’est quand même encore l’hiver, mais Mother Nature a eu envie de nous gâter pendant 2 jours et quand elle décide de nous faire un tel cadeau, ben tu le prends à bras ouvert, avec passion et reconnaissance, même si tu prends le risque d’avoir un tout petit peu froid.

Au moment où j’écris, le froid est revenu. Il neige, ça souffle, le lac est déchaîné mais peu importe, ces deux jours ont illuminé la vie de bien des motards ici en Ontario 🙂

Passe un beau week-end ! 🙂

P.S. Oui je sais, c’est un peu cul-cul mais j’étais tellement contente que j’ai même immortalisé mes couches de vêtements ! La joie de roulerà nouveau nous fait faire des trucs un peu bizarres parfois ! Haha !

WINTER CAMPING IN ALGONQUIN

J’ai envie de te faire découvrir un truc très canadien. En fait, je ne sais pas à quel point c’est développé dans le reste du Canada, mais ici, en Ontario, j’ai l’impression que c’est vraiment ancré dans la culture. Le canoë et ça. Je vais te parler de camping hivernal. Je crois avoir effleuré le sujet sur ce blog mais il ne me semble pas y avoir consacré un article.

Si tu me suis, tu sais que je suis devenue officiellement citoyenne canadienne en 2016. Je suis née en Suisse, j’y ai grandi et vécu la plus grande partie de ma vie. Ce qui fait que même après ces années passées au Canada, je porte toujours sur ce pays un regard tout neuf, un regard de découverte, j’en suis encore au stade de l’émerveillement pour ce nouveau pays. Il faut dire que vu sa taille, tu peux compter des années avant de le connaître comme ta poche.

Je t’ai déjà raconté comme, lorsque j’étais enfant, je faisais des boulimies de lecture des romans de Jack London traduits en français.

Depuis petite j’ai cette fascination pour le Grand Nord, la vie des trappeurs, des aventuriers et les Premières Nations. J’ai passé des heures à rêvasser au Yukon que j’ai fini par découvrir en 2016 (l’année de ma citoyenneté) et si tu connais mon blog, tu as eu un aperçu de mon voyage là-bas. J’aime cet immense espace appelé Canada (nom qui vient de Kanata qui signifie « village » dans un des langages indigènes).

Il y a quelques années, j’ai vécu mon premier camping hivernal dans les Western Uplands en Algonquin (forcément !). À l’époque, Rammy et moi on n’a vraiment pas choisi la voie facile pour notre premier camping hivernal (forcément, aussi ! Haha !). C’était en décembre 2014. L’expérience a été rude. On a souffert, on a eu froid et faim, on est rentrés épuisés, vidés. Diesel et Rocky, notre Rottweiler et notre Jack Russel qui faisaient bien sûr, partie de l’aventure, ont l’air d’avoir un peu moins souffert que nous, quoique… ils ont quand même dormi presque 24 heures de suite quand nous sommes rentrés.

Mais on a appris. On a beaucoup appris. Sur nous-même et aussi sur comment camper en hiver.

Quelques semaines plus tard, malgré les difficultés rencontrées en décembre, en février 2015, par -40 degrés, on plantait à nouveau notre teepee, cette fois à Mew Lake (en Algonquin également). C’est là que j’ai découvert une véritable petite communauté de campeurs d’hiver dont j’ignorais totalement l’existence.

J’avais souvent planté ma tente ou pendu mon hamac dans la région de Mew Lake durant la belle saison, mais là, je découvrais comme un monde parallèle, au coeur du mois de février et de la période la plus glaciale.

Je découvrais des famille entières, qui passent leurs week-ends sous tente, teepee ou même igloo et qui font de leur hiver, une saison de fun, de sport, de rires et de vie en plein air. Des familles avec de jeunes enfants, en plus.

*****

Je suis suis montée à Mew Lake il y a quelques jours, assouvir mon besoin annuel de « winter camping ». Le week-end de la mi-février étant prolongé par un lundi férié, c’est toujours l’idéal pour profiter de s’évader un peu.

J’y ai rejoint mes amis qui sont eux aussi devenus des accros de l’hiver en plein air.

En me promenant d’un campement à l’autre, j’ai réalisé alors que ce que je voyais, correspondait en tout point aux images qui se déroulaient derrière mes paupières lors de mes rêveries d’enfant. Le Canada, le froid, la neige, le feu, les teepees.

Quand tu te promènes dans le campement de Mew Lake, tu te sens un peu comme dans un roman de Jack London. T’es au milieu d’un petit village de toile et de neige… Les gens sont dehors, en train de mouler des briques de neige tassée pour leur iglou ou de couper du bois de feu ou de bricoler quelque chose à leur tente, certains grillent des marshmallows ou cuisent du pain dans leur teepee d’autres t’offrent du chocolat chaud, du café… Tu t’arrêtes à chaque campement pour papoter. « Comment s’est passée ta nuit ? T’as pas eu trop froid ? » – « T’as besoin de bois ? » – « Entre seulement, je viens de cuire du pain ».

Tu te sens bien, chacun resplendit de belle énergie, même si c’est pas toujours facile, même si la température est descendue à -22 durant la nuit, même si camper l’hiver, c’est une dépense incroyable d’énergie et de temps, ça te rend heureux. T’es dehors, tu travailles for pour survivre et je crois que c’est pour ça que t’es bien. Ça te remet à ta place. Dans la Nature.

On s’échange des tuyaux, des idées. Les « winter campers » super chevronnés sont là aussi. Ils côtoient et aident ceux qui sont « nouveaux ».

Durant ce week-end prolongé de février, Mew Lake est un peu « portes ouvertes ». C’est là que les novices ou même ceux qui commencent à s’intéresser de loin au « winter camping » peuvent venir, poser toutes les questions qui leurs taraudent l’esprit par rapport à l’équipement, le bouffe, le froid, les enfants, les activités. Et des questions, il y en a ! Est-ce qu’un tente en canevas avec poêle à bois est une meilleure solution à un teepee ? Comment se chauffe-t-on dans un igloo ? Comment survit-on en tente non-chauffée par -40 ? Comment cuisine-t-on et que mange-t-on quand on vit au froid ? Comment faut-il s’habiller ? etc… etc…

C’est là que les campeurs les invitent à visiter leurs installations aussi.

C’est aussi le week-end où le « centre des visiteurs » de l’Algonquin propose de petites conférences données par les campeurs. Il y a des ateliers, des activités diverses, tout est parfaitement orchestré pour prouver que non, l’hiver n’est pas forcément synonyme de canapé-couverture-télé-hibernation pendant des semaines. L’hiver est une saison qui mérite d’être vécue à part entière.

Si tu passes par là, que tu sois Canadien ou non, mais que tu es curieux de découvrir un peu cette vie parallèle, viens à Mew Lake. Viens découvrir, poser des questions, t’auras des pros super sympas, qui se feront un plaisir de partager leurs expériences avec toi. Pis tu vas te régaler aussi, tu verras !

Mais fais gaffe… mettre un pied à Mew Lake en février, c’est prendre un gros risque : celui de devenir accro à la vie ai grand air, en plein coeur de l’hiver. Je dis ça, je dis rien hein ? 😉

Mew Lake cette année (juste histoire de te donner une idée des styles de tentes utilisées) :

 

Quelques photos de winter camping (en vrac !) prises durant ces précédentes années :

 

 

HAPPY PLACE

En anglais, on entend souvent l’expression « It’s my happy place », « l’endroit où on est bien, où on a des repères, ou on se sent heureux ».

Je suis sûre que toi aussi, tu as une ou même plusieurs « Happy Place ».

Ceux qui me connaissent bien savent qu’Algonquin Provincial Park fait partie de ces quelques endroits particuliers qui représentent tellement à mes yeux.

Chaque fois que j’arrive aux portes de ce territoire, je ressens un sentiment de force et de bonheur purs. C’est un endroit qui dégage une énergie incroyable et qui vibre de puissance et de beauté.

Dès que j’entre sur la « Highway 60 » mon coeur se met à jouer du tambour comme un fou. Cette route est l’une de mes préférées au monde. Aussitôt que j’aperçois le panneau « 60 East to Ottawa », j’ai le sourire jusqu’aux oreilles, mais vraiment. Je ne peux pas m’en empêcher.

Cette route c’est un peu un chemin sacré pour moi. Elle traverse entre autres, le Parc Provincial de l’Algonquin de l’ouest à l’est. J’arrive en général par le côté ouest (West Gate).

C’est toujours pareil : au moment où j’entre sur la « Highway 60 » à Huntsville, je me sens chez moi. J’ai parcouru cette route tellement souvent.

Que ce soit à moto dans la chaleur caniculaire de l’été ou alors en automne, cernée par les couleurs flamboyantes d’Octobre ou que ce soit en voiture au coeur de l’hiver, je suis toujours subjuguée par la beauté des lieux.

D’avance, je connais les noms des panneaux jalonnant cette route qui serpente au sein de cette majestueuse Nature. Je m’amuse à les deviner avant qu’ils n’apparaissent. Oxtongue River, Western Uplands, Tea lake, Smoke Lake, Canoe Lake, Cache Lake, Canisbay Lake, Mew Lake, Lake of Two Rivers et tant d’autres.

Ils sont comme de vieux amis, toujours là, loyaux, fidèles, me souhaitant la bienvenue lors de chacune de mes visites, formant comme une haie d’honneur alors que je m’enfonce plus loin dans le parc.

Et chaque fois, je ressens la même bouffée de bonheur à les retrouver, tous ces noms, ces rochers, ces arbres, ces lacs, ces cascades glacées ou ces couleurs flamboyantes. Chaque fois, mon coeur bat la chamade et je vais t’avouer un truc : il m’arrive même de dire à haute voix, contemplant cette beauté sauvage « Wow ! T’es tellement belle route 60, vous êtes tous tellement beaux, lacs, rochers, arbres, animaux. Est-ce que vous réalisez à quel point vous touchez à la perfection ? »

Je ne sais pas pourquoi mais j’ai presque l’impression qu’ils m’entendent tous, car mois après mois, année après année, on dirait qu’ils sont toujours plus beaux. C’est comme s’ils savaient que j’allais débarquer et qu’ils se disaient « hey les gars, elle vient ce week-end, il faut qu’on l’impressionne encore plus que la dernière fois »

Et ça marche. Virage après virage, pas un seul recoin, pas une seule pierre, pas un seul arbre, pas un seul chemin, ne me lasse, même après toutes ces années. Au contraire, je les aime chaque fois plus, tous, tels qu’ils sont, dans cette perfection immuable.

Je crois que c’est ce qu’on peut appeler sans trop se tromper « l’amour infini et inconditionnel ».

J’ai pris la « Highway 60 » ce week-end pour aller faire du camping d’hiver avec des amis. Elle était magnifique… entourée de stalactites géantes figées dans la roche millénaire. Et une fois encore, je lui ai dit merci d’être aussi belle et généreuse.

Et quand, dans la soirée, alors que groupés autour du feu et enveloppés dans des couvertures j’ai avoué à mes amis que je parlais à la « Highway 60 » j’ai souri lorsque certains d’entre eux ont reconnu qu’eux aussi, il leur arrivait de pousser des exclamations ou des « woow ! » de reconnaissance, en la parcourant.

La « Highway 60 » il y a deux jours :

 

… et je suis allée sortir ces 2 photos qui datent maintenant de 2 ans mais qui, à mes yeux représentent tellement bien cette puissante connexion entre cette région et moi. Je sais que je les ai déjà postées sur ce blog mais elles représentent beaucoup à mes yeux :

 

Passe une belle semaine ! 🙂

 

 

Happy December !

La neige n’arrête pas de tomber, mes essuie-glaces dansent leur sarabande infernale, ça roule au ralenti ce soir. Pare-choc contre pare-choc. Il fait nuit, les lumières scintillent partout à Toronto. Je rentre chez moi, relax… ça ne sert à rien de t’énerver au volant, ça ne débloquera pas les bouchons de circulation pour autant. Alors je prends mon mal en patience et sirote mon capuccino, ma playlist à fond, en mode « aléatoire ».

Au moment ou je passe le carrefour Kingston/Victoria Park, ma playlist me lance « Go West« . Et là, sous les tombées de neige de décembre, je me revois, il y a quelques semaines, fin août, cette même chanson à fond.

C’est tôt le matin, il fait déjà hyper chaud, je cours un peu dans tous les coins de ma petite maison, pour m’assurer que tout est en ordre, que les appareils électriques sont débranchés, la porte de derrière verrouillée, les fenêtres bien fermées. Les chiens sont déjà chez mes amis depuis la veille, ça y’est, tout est prêt. Je peux partir. Partir à l’Ouest. Et j’écoute « Go West » à fond… c’est plein de promesses de liberté, de nouvelles aventures, de découvertes.

Plus de trois mois se sont passés depuis. J’ai l’impression qu’en fait, ces trois mois on duré une seconde. Ces vacances à l’Ouest m’ont tellement aidée à tourner la page d’un chapitre et à en ouvrir une autre, toute neuve. Je suis un peu comme sur un nuage, ivre de liberté.

Si tu m’avais demandé ce printemps comment je voyais mon année 2017, je t’aurais clairement répondu « comme le summum merdique du glauque et de la tristesse »

Mais voilà. Il y a eu l’été, les vacances, puis l’automne et toutes ces semaines qui ont suivi jusqu’à aujourd’hui, apportant leur lot de joie, de surprises et d’événements.

En résumé, j’ai fait un beau voyage solo à moto à Algonquin. J’ai toujours rêvé de partir en solo, la tente et le sac de couchage sur la Scrambler. Ben voilà, c’est fait. J’attends avec impatience le retour de la belle saison pour renouveler l’expérience, mais pour partir plus loin, et plus longtemps cette fois.

Je suis aussi allée camper avec ma tribu habituelle, j’ai rencontré de nouvelles personnes qui m’ont, sans le savoir, beaucoup aidée car les nouveaux venus te perçoivent toujours avec des yeux frais et ont la distance qui te permet parfois de voir les choses sous un autre angle.

J’ai fait des balades à moto avec des nouveaux potes et des anciens aussi. Ma Scrambler à fêté ses 20’000 km. J’ai organisé des fêtes à ma petite maison de la plage, des fêtes où on a traîné autour du feu jusqu’à 7h00 du matin, ou on a bu, dansé, crié, chanté. J’ai été invitée aussi. Je suis allée voir des concerts. Ma tribu d’amis a débarqué un samedi pour m’aider à ratisser les feuilles mortes dans mon immense jardin (qui est tellement plus vaste que la maison elle-même), et tout préparer pour l’arrivée de l’automne, ce qui a donné lieu à une fête mémorable qu’on a baptisé « Harvest Party » et qui va sans doute devenir une de nos traditions. On a fêté l’Oktoberfest dans notre resto bavarois préféré. Et l’Halloween aussi, a donné lieu à une soirée mémorable. J’ai pris un malin plaisir à semer un peu la confusion avec mon masque inspiré d’Immortan Joe.

Puis nous sommes aussi tous montés dans ma cabane au Nord pour fêter l’anniversaire de mon ex âme soeur. Nous sommes sereins tous les deux. Amis pour la vie. Après tout, il est un peu ma famille maintenant, même si le couple n’existe plus. Mais je n’ai plus de pincement au coeur quand on se voit.

Ces semaines ont été riches de rencontres et de rires partagés entre nous tous, mes anciens amis et les nouveaux. Je me suis baignée dans le Lac Ontario pour la Thanksgiving, on a joué du tambour shamanique avec ma pote Darya, j’ai dansé, beaucoup, beaucoup. À la maison, seule, mais aussi avec eux, ceux que j’appelle ma tribu. Mes amis qui sont comme une famille. On partage tant, tous ensemble, les voyages, les aventures, les coups durs.

« Go West » touche à sa fin, les dernières notes s’égrènent dans l’air chaud de ma bagnole. L’air chaud d’août semble ne faire qu’un avec l’air chaud de mon radiateur qui ventile au max en ce soir de décembre. Comme si un pont invisible se créait au-dessus de ma tête, enveloppant ces dernières semaines de chaleur et de douceur.

Je ne me souviens pas avoir été triste ou de mauvaise humeur une seule fois au cours de cet automne ou au début de cet hiver. Je me réveille le coeur joyeux. J’aime être en solo. En fait, quand t’es en solo, t’as pas vraiment le temps d’être seul. T’as tout le temps des trucs qui s’annoncent, des trucs qui se passent.

Et tu vois, il suffit de quelques semaines pour que « le summum merdique du glauque et de la tristesse » se transforme en « 2017 ? Ça a été une année de montagnes russes, un truc de fou, une vraie douche écossaise, mais au final, je souris, je ris, je danse et mon coeur est tout léger, tout joyeux. Je suis retombée sur mes pieds, bien droite dans mes bottes et j’avance à grands pas ». Cette année 2017, je l’aime dans le fond. Je ne l’oublierai pas de si tôt.

Puis au passage (parce que je sais que tu te poses sûrement la question) : les chiens vont bien. Mon bon vieux Rocky fête ses 12 ans le 18 décembre, il est encore bien alerte et fait régner sa loi comme un boss de la mafia et Yukon, il est un peu fou fou comme tous les jeunes chiens mais dès que tu te poses, c’est le premier à venir poser sa tête sur tes jambes pour réclamer des câlins. Ils vont bien, ils m’accompagnent presque partout et si je ne peux pas les prendre, ils vont se faire dorloter chez l’un ou l’autre de mes amis.

J’espère que toi tu vas bien, que t’as aussi une belle neige qui scintille sous tes fenêtres et que cette fin d’année te laisse une traînée de bonheur et de belles choses.

Voilà, en vrac, quelques clichés de ces derniers temps. De ma vie quotidienne, de ma plage et mon Lac Ontario, de mon travail, de mes balades, de Toronto, un gros mélange de tout !

Si je ne repasse pas ici avant le 31 décembre, je te souhaite un doux et lumineux Noël, un beau solstice d’hiver et beaucoup d’énergie et de passion pour 2018. Et je vais de ce pas réserver un « camp ground » en Algonquin pour notre traditionnel « Winter Camping » de février. En route pour de nouvelles aventures !

À bientôt 🙂

P.S. Parfois, il me prend la lubie d’écrire en anglais (ouais, va savoir pourquoi ! J’aime bien les défis, quoi !) mais je n’ai pas envie d’avoir un blog complet en anglais. Du coup, je poste parfois des textes sous des photos de mon compte Instagram, ça me fait un bon exercice !

 

STAY WILD, MOON CHILD !

Au moment où j’écris ces lignes, j’entends, tout proche, le rugissement des vagues du Pacifique. On est début septembre mais ils fait encore chaud à Tofino sur l’Île de Victoria. Les surfeurs défilent, souples, bronzés, leur planche sous le bras ou sur la tête, il ressemblent à de grands oiseaux préhistoriques.

Tofino c’est un paradis de surfeurs. Long Beach et ses incessants rouleaux les attirent tel un aimant. Ils déferlent sur les vagues, guerriers à l’assaut des éléments.

Je suis arrivée hier dans l’après-midi, après environ 5 heures de route. Tofino c’est un petit village typique, un peu la version estivale de nos stations de snowboard et de ski en Suisse. Le climat est différent mais je retrouve la même ambiance, les mêmes symboles, les même valeurs. On respire, on vit par la planche et le grand air.

Victoria Island, c’est aussi le paradis des motards. Les routes tortueuses longent le Pacifique ou traversent d’épaisses forêts. J’en vois partout, je papote avec eux. Ma Scrambler me manque. Je rencontre beaucoup de motocyclistes en GS, en Ducati Multi Strada, en KTM. Il y a pas mal de Harley aussi, on est en Amérique du Nord… Ils aiment leurs machines made in US.

Je campe juste au-dessus de McKenzie Beach, la vue plongeante sur le Pacifique. Il fait tellement chaud que, délaissant la tente, je passe mes nuits dans mon hamac, la lune caressant mon visage, bercée par la marée montante et l’air du large. Ça fait un peu plus de 10 jours que je me suis envolée de mon Ontario.

Juste avant Tofino, j’ai passé 4 jours sur Sombrio Beach, à environ 5 heures de route. Si c’est aussi un paradis, ce n’est pas celui des surfeurs mais plutôt celui des hippies, des back packers. La plage est nichée au pied d’une rainforest, une forêt tropicale. C’est humide ici, tout à l’ouest du Canada. Humide et chaud. Les arbres sont immenses, le paysage est digne du « Seigneur des Anneaux ». Au-dessus de nos têtes, gronde une cascade, un peu magique paraît-il. Elle surgit de nulle part pour aller se jeter dans le Pacifique.

La nuit, les tentes du village hippie s’éclairent, les feux jaillissent, malgré l’interdit imposé suit aux feux de forêts de ces semaines. On entend des tam-tam, de la techno, ça danse, ça rit, ça boit. C’est comme un cocon. Tout le monde est juste bien. Qu’on soit vadrouilleur, aventurier ou simplement travailleur en vacances, on se retrouve tous à respirer les bonnes énergies de Mother Nature pour quelques jours, le temps que nos vies nous dispersent à nouveau aux quatre vents. Je m’endors bercée par le Pacifique, je me réveille au coeur de sa puissance.

Et avant ça, avant Tofino et Sombrio j’étais où ? Dans un autre petit paradis, celui par lequel j’ai commencé ce petit voyage de 2 semaines. Au paradis des bons vins. J’étais chez ma tante, mon oncle et mon cousin, dans la Similkameen Valley. J’en avais parlé un peu , en 2012, lors de mon dernier séjour chez eux.

Les choses on bien évolué de leur côté. Le domaine s’est considérablement agrandi, mon cousin a acquis une belle notoriété dans le milieu viticole, accumulant les récompenses et les médailles. Ça bosse fort mais l’ambiance y est belle et énergique.

La Similkameen Valley est sise au fond d’un désert. Entourée de rocs arides, verdoyante et fraîche, elle constamment irriguée avec amour par tous ces travailleurs de la terre, vignerons ou maraîchers. Il y fait chaud et sec. Le ciel est parfois trouble ces jours, les feux de forêt faisant rage en Colombie Britannique. Le vent pousse les cendres, l’air sent le feu.

Je passe beaucoup de temps avec ma tante qui n’a que 10 ans de plus que moi. Nous sommes sur la même longueur d’ondes, comme deux soeurs, deux gémeaux un peu fêlées parfois (aux dires de mon oncle ! Haha !). Nous nageons dans la rivière proche, passons des heures à papoter, à déguster des vins. Elle est aussi passionnée par la culture des Premières Nations, elle a fabriqué son propre teepee, a vécu des expériences chamaniques et m’a fait don d’un de ses tambours. Ça représente un cadeau inestimable à mes yeux.

On passe nos soirées autour d’une immense table dans le jardin où on se retrouve à une dizaine, parfois plus, traînant jusqu’à tard dans la nuit. On parle le français ensemble, notre accent suisse est intact, malgré toutes les années d’expatriation. On rit beaucoup. Ma chambre s’appelle « la chambre des Indiens » elle a été préparée avec soin pour moi. Je m’y sens bien. Comme en apesanteur. La nuit, le vent fait tinter le carillon devant ma fenêtre.

Ça fait 10 jours que je suis partie mais j’ai l’impression que mon voyage a duré plus longtemps que ça. Je crois que ça tient au fait que j’effectue deux voyages en même temps : le réel, géographique, qui me mène de part en part et celui intérieur. Ma reconnexion avec moi, avec cette liberté enivrante de me trouver en solo. Je suis seule mais à aucun moment je ne me sens seule.

Il me reste encore 3 jours à Tofino, je repars en Ontario vendredi, emplie d’une énergie nouvelle. Un peu pareille, un peu différente de celle que j’avais rapportée du Yukon, il y a exactement un an.

La vie chez les vignerons de la Simikameen Valley :

Sombrio Beach :

Tofino / Long Beach :

YUKON LE MARIN D’EAU DOUCE

Je reviens de 4 jours à Georgian Bay. Je sais que je t’ai déjà parlé plus d’une fois de cette région mais chaque fois que j’y retourne, je retrouve avec bonheur cette sensation de pouvoir respirer très fort, de remplir mes poumons de l’énergie piquante de l’air de Killarney et du grand large.

Je parle de grand large comme un vieux loup de mer, alors qu’il ne s’agit bel et bien que d’une baie. Mais quelle baie. Georgian Bay (ou Baie Georgienne) fait partie du lac Huron et juste pour te donner une idée, elle mesure 15’000 km2. Y a quand même de quoi se sentir presque en mer.

Elle est constellée de petites îles, de gros rochers polis par l’érosion, couronnés de quelques arbres. En été, la roche devient brûlante et chauffe le bord de l’eau.

Tout la région de Philip Edward Island et des autres îles est ce qu’on appelle en anglais « Crown Land » (« Terres de la Couronne »), c’est-à-dire que, contrairement aux parcs nationaux et provinciaux, tu peux y camper comme bon te semble, pour autant qu’il n’y ait pas déjà quelqu’un d’autre, sans permis et sans frais.

Tu peux te rendre sur l’île de ton choix en canoë ou, si vraiment tu souhaites aller loin au large sans passer une journée entière à ramer, tu peux aussi louer ce qu’on appelle un « water taxi », un bateau à moteur. C’est l’option que nous avons choisie, car n’ayant que 4 jours de congé, ramer des heures n’était pas trop possible. D’autant plus que nous ne savions pas comme Yukon allait réagir.

Nous sommes montés vendredi soir à Killarney, au campement « Killarney Outfitters » où travaille notre ami Dylan. Partis de la région de Toronto vers 16h00, nous y sommes arrivée vers 20h00. Là on a planté les tentes pour une nuit, histoire de pouvoir prendre le bateau assez tôt le lendemain. Le bateau et son « capitaine » peut être réservé via « Killarney Outfitters ». C’est assez coûteux (580.– dollars) mais si tu te mets à plusieurs pour partager les frais, c’est une bonne option.

On a embarqué au petit port de Killarney samedi matin et on a pris la large. Il faisait un peu gris mais la température était douce. On avait déjà un peu une idée de quelle île allait abriter notre petit séjour. La première fois, on avait ramé sur une île de Philip Edward Island, la seconde fois on avait loué un « water taxi » pour nous rendre sur West Fox Island et cette fois, on a opté pour East Fox Island. Restait à savoir si elle serait libre ou déjà occupée. On a eu de la chance, elle nous attendait à bras ouverts.

Je pense que sur les 3 îles que je connais, celle-ci est ma préférée. La roche monte d’abord en pente douce depuis le bord de l’eau, puis devient un peu plus raide jusqu’au sommet où nous avons installé les tentes. La vue de là-haute est imprenable. Aussi loin que te porte le regard ce n’est qu’eau et petites îles. Et même si ces dernières abritent d’autres campeurs, elles semblent inhabitées. On a l’impression d’être seul au monde. Les seuls indices de présence humaine sont les feux de camp qui s’allument une fois la nuit tombée et que tu peux parfois voir trembloter au loin, au-delà des eaux.

On a installé la cuisine au bord de l’eau, le foyer abrité du vent derrière un rocher.

Et Yukon dans tout ça ? Il s’est comporté dans le canoë comme un chef ! Il a d’abord un peu paniqué lorsqu’on l’a fait monter à bord, mais une fois installé, il s’est assis. Il a vu Rocky se coucher tranquillement au fond de l’embarcation et je pense que ça l’a rassuré. On a fait un petit tour de l’île sans incident. Je crois qu’à l’avenir, je pourrai l’emmener dans des petites randonnées sur l’eau sans trop me faire de souci.

On a tous passé 4 jours formidables, 4 jours de rires, de feux de camp, de bon vin, de bouffe, de lecture, et on a beaucoup nagé et ramé aussi. Nous avions tous, pour une raison ou pour une autre, besoin de décrocher, de lâcher prise de nos vies professionnelles, de notre quotidien surchargé, de nos souci ou de notre fatigue.

Passer 4 jours sur une île de Georgian Bay, c’est comme cliquer sur « restart ».

Et comme toujours, quand tu acceptes de te laisser bercer par Mother Nature, tu rentres chargé d’énergie, de soleil et de vent, tes cheveux sentent le feu et tu sens que tes batteries sont rechargées à bloc, jusqu’au voyage suivant en tout cas.

Passe une belle fin de semaine 🙂

À Georgian Bay, c’est ça qui te réveille 🙂 le chant de l’air pur et des flots

 

 

Et après… ?

Oui, comment c’est, « après »… ? Une fois que l’orage qui s’est abattu sur ta vie commence à prendre le large, une fois que les grondements de tonnerre commencent à s’estomper et que la pluie de tes larmes cesse de ruisseler ?

Après, c’est la vie, de nouveau. Tu te redécouvres, tu prends goût à être avec toi-même. Tu fais le bilan. T’as vécu plus de 11 années d’aventures, de découvertes, de craintes, de deuils, de rires, de larmes aux côté de ton âme soeur. Ces 11 années t’appartiennent à jamais. Il ne tient qu’à toi de les chérir et de leur laisser la place qu’elle méritent dans ton coeur, de ne pas laisser la tristesse ou la rancoeur les torpiller.

Je commence à recoller les morceaux. Je crois que ce que j’ai pleuré, ce sont toutes ces années passées. Nos belles années. Ma foutue nostalgie a encore frappé. Je ne pleure pas le présent, je ne pleure pas parce qu’il me manque car en fait, avec le recul, je réalise que je me sens bien, là maintenant.

Une fois le choc passé, j’ai regardé en arrière. J’aimais ce que nous étions, cette toute petite tribu de nous deux et des chiens. J’aimais ce « team » qu’on avait formé, ça fonctionnait à merveille. On vivait sans cesse dans l’action, dans les rêves. J’ai utilisé le mot « team » car c’est exactement ce qui nous étions devenus.

Il a vu clair avant moi, il y a été sensible avant moi : nous n’étions plus vraiment un « couple » dans le sens romantique du terme. Nous étions devenus un « team de partenaires », certes parfaitement huilé mais qui, petit à petit a commencé à lui peser.

Ça arrive souvent au sein des couples, ce truc-là. Tout à coup la passion n’est plus.

Moi, toute plongée que j’étais dans notre trépidante vie, j’ai ignoré (consciemment ou inconsciemment) ce fait. Ça m’allait très bien, d’être aussi complice avec mon compagnon d’aventures. Ça m’allait très bien de partager les rires, les douleurs physiques de nos randonnées et de nos nuits par -40 degrés dans le Nord, les feux de camps sous les étoiles, la vie quotidienne. Nos activités incessantes, nos voyages, nos projets équilibraient pour moi ce « manque de passion et de romantisme ».

Mais maintenant, je réalise qu’effectivement, notre couple était devenu un « team ». Et ça a fini par lui peser.

Aujourd’hui j’y vois clair, et je vais de l’avant. Ma famille a été extrêmement présente, depuis ma lointaine petite Suisse. Mon frère, mon papa, ma belle-soeur et mes nièces ont été aux petits soins à distance. Ma famille est mon roc.

Je souris à nouveau à ma vie quotidienne dans cette petite maison au bord du lac Ontario. C’est l’été, les amis débarquent pour des grillades, des soirées à la plage, je fais beaucoup de virées à moto, de petits voyages, je lis tout le temps, je bricole, je jardine même. Et les chiens sont toujours là, indispensable à ce sourire retrouvé.

Yukon, mon petit Kelpie australien a grandi, il a eu 1 an en juin (on a notre fête presque en même temps). Rocky, mon petit pépé Jack Russel de bientôt 12 ans est plus vigoureux que jamais. J’en reviens pas. Il botte le cul de Yukon (pourtant plus grand que lui) et comme toujours, c’est un peu le boss du coin ! Ils font partie de presque toutes mes activités, je les prends partout où je peux et j’organise souvent des trucs en fonction d’eux.

Je les emmène camper avec mes amis et mon ex-âme soeur, qui, malgré sa décision de faire route seul, est resté mon compagnon de voyage et d’aventures. Là, on reste et on restera toujours sur la même longueur d’ondes. On se fait confiance et il le faut. Tu ne peux pas partir en « canoe trip » ou aller crapahuter dans la Nature sauvage avec quelqu’un sur qui tu ne peux t’appuyer en cas de coup dur ou d’accident. Tu dois pouvoir compter sur tes compagnons d’aventure, quoi qu’il arrive. On a des projets de voyage au Yukon (à nouveau) et d’Alaska. Comme par le passé, on regarde les cartes géographiques, on repère des coins, on se renseigne sur des contrées encore inconnues pour nous.

Nous sommes quelques-uns à partir ce soir pour 4 jours à Georgian Bay. J’aime cette région. Les eaux y sont infinies, on se croirait en plein océan. En anglais on appelle ça « open water ». Quand tu regardes à l’horizon, il n’y a que de l’eau. Ça va être la première expérience de Yukon en canoë. On va voir comment il gère ça.

Rocky est un vieux campeur chevronné, il a l’habitude du canoë. Chaque chien réagit différemment. Diesel, mon beau rottweiler (qui me manque tellement) avait un peu la trouille sur l’eau. Il restait debout, les pattes crispées et tremblantes, risquant de nous faire chavirer à chaque instant. Et il faisait son poids : 65 kg… alors je te laisse imaginer la scène…

Au boulot, ben ça va plutôt bien aussi. J’occupe un poste qui me laisse pas mal indépendant au sein de la boîte. Je suis la seule francophone et je produis les spots TV et radio en français pour notre département de Post Production. Du coup ils me font confiance, ils ne comprennent pas le français de toute façon.

J’aime cette responsabilité, cette autonomie. Je travaille principalement en studio de montage et en studio d’enregistrement, où des acteurs voix enregistrent mes adaptations publicitaires.

On est une bonne équipe. J’avoue que parfois, bosser pour une grosse boîte, peut s’avérer un eu lourd. Je n’abandonne pas l’idée de partir un jour en indépendante mais pour l’instant, ça va bien. Après 11 ans de boîte je suis bien rôdée… Mais j’ai envie d’apprendre de nouveaux trucs et j’ai parfois l’impression de stagner.

Notre maison en rondins est un succès tel qu’on n’a pas encore pu en profiter. Elle a été louée pratiquement non-stop depuis le mois de mai. Je ne vais pas m’en plaindre, ça paie l’hypothèque et les assurances.

On va voir si on a des gens intéressés à la louer en hiver aussi. Je pense que oui car elle est située au coeur d’un véritable réseau de pistes à travers bois, parfaites pour le ski de fond, la raquette ou la motoneige. Et les Ontariens aiment leurs sports d’hiver. On va tester et voir si elle se loue bien pendant la saison de neige.

Alors voilà. Je voulais juste passer, te donner quelques nouvelles car j’ai reçu des emails et des commentaires très sympas, qui m’ont fait beaucoup de bien et qui ont eux aussi contribué à me redonner le sourire.

Je te souhaite un beau week-end ! 🙂

Quelques bribes imagées de ces derniers jours :

 

 

 

 

🇨🇭 726 ANS DEMAIN ! 🇨🇭

Demain c’est le 1er août, la fête de la Suisse, de mon beau petit pays. Les montagnes vont s’éclairer des mille feux, allumés ici et là dans chaque village. Les lacs vont scintiller sous les feux d’artifice, les enfants, flambeaux rouges à croix blanche à la main, seront fébriles. Y’aura du Guillaume Tell et de l’Heidi dans l’air. Y’a des choses qui ne changent pas. Des rituels immuables. On va entendre l’hymne national à la radio, dans nos quatre langues… « Sur nos monts quand le soleil… »…

La montagne d’où vient ma famille sent bon les foins à cette période de l’année. Mon papa décore la maison, il écoute du Yodel ou de la musique Appenzelloise. C’est drôle, nous sommes Romands, Vaudois mais on a toujours bien aimé le folklore suisse-allemand chez nous. C’est sûrement aussi parce que notre maman était Suisse-Allemande. On est une famille comme beaucoup d’autres en Suisse : moitié-moitié. Et même si le français a toujours été notre langue maternelle et officielle, ben au bout d’un moment, t’as quand même les cultures qui se mélangent.

Mon papa va préparer un bel apéro avec des petits drapeaux en papier et du vin blanc de chez nous et mon frère, ma belle-soeur et leurs petites vont sans doute arborer leurs chemises traditionnelles pour l’occasion.

La même chemise que celle que je portais hier, pour la fête nationale suisse organisée par le Club Suisse de Toronto. Le 1er août n’est pas férié ici, alors on a fêté avec 2 jours d’avance.

La fête se déroulait à Milton, un peu à l’ouest de Toronto. J’y suis allée avec Anthony, un de mes amis suisses et sa femme canadienne. Ils sont jeunes mariés, elle s’intéresse beaucoup à notre culture.

Je me suis préparée, j’ai passé dans mon jeans, la ceinture en cuir, celle avec les vaches et les armaillis, j’ai enfilé ma chemise traditionnelle avec des edelweiss et j’ai sauté sur ma moto pour franchir les 80 km qui séparent Pickering de Milton où mes amis m’attendaient.

J’ai tout de suite repéré l’entrée de la propriété… Mes compatriotes arboraient tous des vêtements aux couleurs du drapeau, ou même des costumes folkloriques traditionnels. Il faisait beau et chaud, l’air sentait bon la « bratwurst » grillée, les röstis, les spätzlis et autres émincés à la zürichoise.

Chacun s’est installé aux tables à l’extérieur ou dans l’herbe, par petits groupes, savourant les saveurs helvétiques, pendant qu’à l’intérieur de la grange décorée pour l’occasion, un trio jouait du cor des alpes. Je me suis laissée habiter par la musique, les dialectes suisses-allemand tout autour de nous, le goût du « Nussgipfel »…

C’était drôle car ça m’a rappelé les fêtes de village, quand j’étais petite. Ça a fait la même chose à Anthony. Comme si tous ces Suisses expatriés avaient emporté avec eux, jusqu’au plus profond de leurs fibres, les moindres couleurs et arômes de nos traditions.

C’était une belle fête, c’était joyeux. Et quand la « Guggen Muzik » de Toronto a commencé à taper du tambour, même les petites grand-mamans vissées sur leur chaise se sont levées d’un bon en tapant des mains et en riant.

Je les observais, essayant de deviner leurs souvenirs, leur passé en Suisse. D’où venait-elle, cette petite mamie avec un gentil visage tout rond ? Du canton de l’Emmental, comme mon arrière-grand-mére ? D’Appenzell ? de Luzern ? Et ce petit pépé là-bas, au fond de la salle… quel accent pouvait-il bien avoir ? Genevois, Valaisan ? Qu’est-ce qui l’a fait venir au Canada ? Et cette dame, là, en costume traditionnel, où avait-elle appris à jouer si bien du cor des alpes ? Pis cette jeune fille de la « Guggen Musik » qui soufflait dans sa trompette à se faire péter les veines du cou… est-ce qu’elle était de la deuxième génération ? A-t-elle vécu en Suisse ou est-elle née au Canada, perpétuant les traditions transmises par sa famille ?

J’ai adoré passer l’après-midi à Milton, au milieu de tous ces expats. C’est drôle parce que quand on se retrouve à plusieurs Suisses comme ça, on ne sait jamais par quelle langue commencer. On ne sait jamais si notre interlocuteur est germanophone, francophone, italophone ou romanche. Alors on est un peu maladroit. On se baragouine en anglais, l’oreille tendue, prête à saisir l’accent et identifier un bonne fois pour toute, quel langage suisse adopter. Et des fois, on fait des mélanges. T’as 2 mors de français et 3 d’allemand dans la même phrase…

J’aime ça de ma petite Suisse. Notre diversité culturelle. Notre pays s’est construit sur 4 langues différentes, 26 cantons et autant d’accents et de sensibilités.

Des fois, vue de l’étranger, je trouve qu’il a des couilles, mon petit pays  (si on peut dire ça comme ça). Elle est bornée, certes, ma petite Helvétie… elle est têtue comme une mule, elle fait tout à sa tête, mais sans trop de violence. J’aime sa foutue démocratie directe unique au monde,  ses paysages, ses lacs, ses montagnes, ses châteaux et ses fontaines partout. J’aime aussi ses paradoxes, son côté un peu vieux jeu et parfois tellement jeune et audacieux… sa rudesse et sa grâce. Elle est unique. Minuscule sur la carte du monde mais malgré tout, solide comme un roc.

Elle m’a donné de robustes racines que je chéris chaque jour et qui, aujourd’hui encore, continuent à croître dans mon coeur, s’entrelaçant aux toutes jeunes racines de cette belle et sauvage nature canadienne.

🇨🇭 Joyeux 1er août à tous ! 🇨🇭

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